et je ne crois point du tout mais du tout à ceux qui prétendent s’être toujours trouvés d’accord avec le moi de la veille.
Mon ouvrage se ressentira donc par la forme de ce laisser-aller de mon esprit, et pour commencer, je laisserai là l’exposé de ma conviction sur l’utilité de ces Mémoires, et je le compléterai par l’exemple du fait, au fur et à mesure du récit que je vais commencer.
Qu’aucun de ceux qui m’ont fait du mal ne s’effraie, je ne me souviens pas d’eux ; qu’aucun amateur de scandale ne se réjouisse, je n’écris pas pour lui.
Je suis née l’année du couronnement de Napoléon, l’an XII de la République française (1804). Mon nom n’est pas Marie-Aurore de Saxe, marquise de Dudevant, comme plusieurs de mes biographes l’ont découvert, mais Amantine-Lucile-Aurore Dupin, et mon mari, M. François Dudevant, ne s’attribue aucun titre. Il n’a jamais été que sous-lieutenant d’infanterie, et il n’avait que vingt-sept ans quand je l’ai épousé. En faisant de lui un vieux colonel de l’empire, on l’a confondu avec M. Delmare, personnage d’un de mes romans. Il est vraiment trop facile de faire la biographie d’un romancier en transportant les fictions de ses contes dans la réalité de son existence. Les frais d’imagination ne sont pas grands.
On nous a peut-être confondus aussi, lui et moi, avec nos parens.
Marie-Aurore de Saxe était