Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/36

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et vaincue par un sentiment de charité maternelle envers sa compagne[1].

Un mois après, Jonquille et Agathe, toujours inséparables, quoique de même sexe et de variétés différentes, vivaient en pleine liberté sur les grands arbres de mon jardin. Elles ne s’écartaient pas beaucoup de la maison, et elles élisaient leur domicile de préférence sur la cime d’un grand sapin. Elles étaient longuettes, lisses et fraîches. Tous les jours, comme c’était la belle saison, et que nous mangions en plein air, elles descendaient à tire d’ailes sur notre table, et se tenaient autour de nous comme d’aimables convives, tantôt sur notre épaule, tantôt volant au devant du domestique qui apportait les fruits, pour les goûter sur l’assiette avant nous.

Malgré leur confiance en nous tous, elles ne se laissaient prendre et retenir que par moi, et à quelque moment que ce fût de la journée, elles descendaient du haut de leur arbre à mon appel, qu’elles connaissaient fort bien et ne confondaient jamais avec celui des autres personnes.

  1. Il paraît que cette prodigieuse histoire est la chose la plus ordinaire du monde, car, depuis que j’ai écrit ce volume, nous en avons vu d’autres exemples. Une couvée de rossignols de muraille, élevée par nous, et commençant à peine à savoir manger, nourrissait avec tendresse tous les petits oiseaux de son espèce que l’on plaçait dans la même cage.