Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/560

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cercueil. Il l’avait dégagé de la terre, examiné et ouvert. Il y avait trouvé les ossemens d’un petit enfant. Il avait cru d’abord que quelque infanticide avait été caché en ce lieu, mais il avait trouvé le carton écrit intact entre les deux vitres, et il y avait lu les noms du pauvre petit Louis, et les dates si rapprochées de sa naissance et de sa mort. Il n’avait guère compris, lui, dévôt et superstitieux, par quelle fantaisie on avait ôté de la terre consacrée ce corps qu’il avait vu porter au cimetière ; mais enfin il en avait respecté le secret. Il s’était borné à le dire à ma grand’mère, et il nous le disait maintenant pour que nous avisassions à ce qu’il y avait à faire. Nous jugeâmes qu’il n’y avait rien à faire du tout. Faire reporter ces ossemens dans le cimetière, c’eût été ébruiter un fait que tout le monde n’eût pas compris et qui, sous la Restauration, eût pu être exploité contre ma famille par les prêtres. Ma mère vivait, et son secret devait être gardé et respecté.

Ma mère m’a raconté le fait ensuite et a été satisfaite que les ossemens n’eussent pas été dérangés.

L’enfant resta donc sous le poirier, et le poirier existe encore. Il est même fort beau, et, au printemps, il étend un parasol de fleurs rosées sur cette sépulture ignorée. Je ne vois pas le moindre inconvénient à en parler aujourd’hui. Ces fleurs printanières lui sont un ombrage moins sinistre que le cyprès des tombeaux. L’herbe et