Page:Sand - Histoire de ma vie tomes 1a4 1855 Gerhard.djvu/627

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quelques jours nous crûmes que notre rocaille allait s’élever jusqu’aux nues. Quand elle fut terminée, elle avait acquis dans notre cervelle les proportions que nous avions rêvées, et j’ai besoin de me rappeler qu’en montant sur ses premières assises je pouvais en atteindre le sommet ; j’ai besoin de voir le petit emplacement qu’elle occupait, et qui existe encore, pour ne pas me persuader, encore aujourd’hui, que c’était une caverne de montagne.

C’était du moins très joli ; je ne pourrai jamais me persuader le contraire : Ce n’étaient que cailloux choisis, mariant leurs vives couleurs ; pierres couvertes de mousses fines et soyeuses, coquillages superbes, festons de lierre au-dessus et gazons tout autour. Mais cela ne suffisait pas ; il fallait une source et une cascade, car une grotte sans eau vive est un corps sans âme. Or, il n’y avait pas le moindre filet d’eau dans le petit bois. Mais ma mère ne s’arrêtait pas pour si peu. Une grande terrine à fond d’émail vert, qui servait aux savonnages, fut enterrée jusqu’aux bords dans l’intérieur de la grotte, bordée de plantes et de fleurs qui cachaient la poterie, et remplie d’une eau limpide que nous avions grand soin de renouveler tous les jours. Mais la cascade ! nous la demandions avec ardeur.

« Demain vous aurez la cascade, dit ma mère ; mais vous n’irez pas voir la grotte avant que je