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HISTOIRE

tion qui se vendrait bien cher. Combien, petit garçon, veux-tu vendre ton invention ?

Car ces mariniers étaient riches, et ils s’empressaient tous d’offrir leur bourse à Gribouille, enchérissant les uns sur les autres, et se menaçant les uns les autres.

« Si ma barque vous fait plaisir, dit Gribouille, prenez-la, messieurs. »

Il n’eut pas plutôt dit cette parole, que les mariniers se jetèrent comme des furieux sur la barque, se donnant des coups à qui l’aurait, s’arrachant des poignées de cheveux et se jetant dans la mer à force de se battre. Mais, comme la barque était une feuille de rose de l’île enchantée, à peine l’eurent-ils touchée qu’ils en éprouvèrent la vertu : ils se sentirent tout calmés par la bonne odeur qu’elle avait, et, au lieu de continuer leur bataille, ils convinrent de garder la barque pour eux tous et de la montrer comme une rareté au profit de toute leur bande.

Cette convention faite, ils vinrent remercier Gribouille de son généreux présent, et, quoiqu’ils fussent encore assez grossiers dans leurs manières, ils l’invitèrent de bon cœur à venir dîner avec eux et à demeurer dans celle de leurs maisons qu’il lui plairait de choisir.

Gribouille accepta le repas, et, comme il portait les habits avec lesquels il avait quitté la contrée cent ans aupa-