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HISTOIRE

Gribouille, qui souffrait de sa piqûre, mais qui n’était pas si simple qu’il ne connût les propriétés des herbes de la forêt, cueillit diverses feuilles, et, après avoir bien lavé son bras dans le ruisseau, y appliqua ce baume et puis s’endormit. Pendant son premier sommeil, il lui sembla entendre une musique singulière : c’était comme des grosses voix de chantres de cathédrale, qui sortaient de dessous terre et qui disaient en chœur :

Bourdonnons, bourdonnons,
Notre roi s’avance.

Et le ruisselet, qui fuyait sur les rochers, semblait dire d’une voix claire aux fleurettes de ses rives :

Frissonnons, frissonnons,
L’ennemi s’avance.

Et les grosses souches du chêne avaient l’air de se tordre et de ramper sur l’herbe comme des couleuvres. Les pervenches et les marguerites, comme si le vent les eût secouées, tournoyaient sur leurs tiges comme des folles ; les grandes fourmis noires, qui aiment à butiner dans l’écorce, descendaient le long du chêne et se dres-