Page:Sand - Isidora, 1845.djvu/186

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

pour s’assurer ces richesses, jouent avec la passion, menacent d’une rupture, feignent la jalousie, poursuivent de leurs transports étudiée un amant qui les quitte, enfin trafiquent de l’amour d’une manière honteuse. À celles-là rien de sacré, rien de vrai. Elles n’aiment jamais ; elles quittent un amant par la seule raison qu’un amant plus riche se présente. Ces femmes-là me font horreur, et je me surprends à les mépriser, comme si j’étais irréprochable. Mais quelques-unes d’entre nous valent mieux, sans qu’on s’en aperçoive, sans qu’on leur en sache aucun gré. Elles ne calculent pas, elles ne comptent pas avec la richesse. Le hasard seul a voulu que le premier objet de leur passion fût riche, et elles n’ont pas prévu qu’en se laissant combler, elles seraient regardées bientôt comme vendues. Puis, dans l’habitude de luxe où elles vivent, avec les besoins factices qu’on leur crée, avec l’entourage de riches admirateurs qui fait leurs relations, leur âme s’amollit, leur constitution s’énerve, le travail et la misère leur deviennent des pensées de terreur. Si elles changent d’amant, c’est un riche qui se présente, c’est un riche qui est accepté. Devenues futiles et aveugles, un homme simple et modeste n’est plus un homme à leurs yeux ; il n’exerce pas de séduction sur elles ;