Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
16
jean ziska.

l’étude de l’histoire, je crois qu’on devinerait beaucoup de choses qu’avec la seule érudition il sera peut-être à jamais impossible d’affirmer.

Deviner l’histoire de la pensée humaine, voilà en effet à quoi nous sommes réduits en ce temps de scepticisme, après tant de siècles d’hypocrisie. Que dis-je ? l’hypocrisie et le scepticisme sont de tous les temps, et presque toujours l’histoire, surtout l’histoire des religions, a été écrite sous l’une ou l’autre inspiration. L’Église a écrit l’histoire, c’est elle qui l’a le plus et le mieux écrite dans le passé : l’Église a été forcée de l’écrire selon ses intérêts, ses ressentiments et ses terreurs. Les souverains ont fait écrire l’histoire, et les souverains ont fait comme l’Église. Comme le pouvoir spirituel et le pouvoir temporel ont été aux prises éternellement, voilà déjà de grandes contradictions entre les historiens des deux camps. Puis les philosophes et les hérétiques ont écrit l’histoire : ressentiment et amertume contre les pouvoirs oppresseurs, crainte et jalousie entre les diverses sectes et les diverses philosophies, ignorance et précipitation de jugement, voilà ce qu’on trouve chez la plupart de ces historiens. Nouvelles contradictions ! où est donc la vérité de l’histoire au milieu de ce conflit ? L’histoire n’existe pas, je vous le jure ; que les pédants en pensent ce qu’ils veulent !

Mais comme la Providence ne fait rien d’inutile, l’humanité, sur laquelle et par laquelle agit chez nous la Providence, ne fait rien d’inutile non plus. Le passé a entassé devant nous des montagnes de matériaux, l’avenir en profitera. Le présent s’en effraie et y porte une main timide. Mais vienne le réveil des grands sentiments, vienne un siècle des lumières qui ne sera ni celui de Léon X ni celui de Louis XIV, mais celui de la justice et de la droiture, l’histoire se fera, et nos petits-en-