Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/233

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GABRIEL, seul.

Ôtons vite la robe de Déjanire, elle me brûle la poitrine, elle m’enivre, elle m’oppresse ! Oh ! quel trouble, quel égarement, mon Dieu !… Mais comment m’y prendrai-je ?… Tous ces lacets, toutes ces épingles… (Il déchire son fichu de dentelle et l’arrache par lambeaux.) Astolphe, Astolphe, ton trouble va cesser avec ton illusion. Quand j’aurai quitté ce déguisement pour reprendre l’autre, tu seras désenchanté. Mais moi, retrouverai-je sous mon pourpoint le calme de mon sang et l’innocence de mes pensées ?… Sa dernière étreinte me dévorait ! Ah ! je ne puis défaire ce corsage ! Hâtons-nous !…(Il prend son poignard sur la table et coupe les lacets.) Maintenant, où ce vieux Marc a-t-il caché mon pourpoint ? Mon Dieu ! j’entends monter l’escalier, je crois ! (Il court fermer la porte au verrou.) Il a emporté mon manteau et le voile !… Vieux dormeur ! Il ne savait ce qu’il faisait… Et les clefs de mes coffres sont restées dans sa poche, je gage… Rien ! pas un vêtement, et Astolphe qui va vouloir causer avec moi en rentrant… Si je ne lui ouvre pas, j’éveillerai ses soupçons ! Maudite folie ! Ah !… avant qu’il entre ici, je trouverai un manteau dans sa chambre… (Il prend un flambeau, ouvre une petite porte de côté et entre dans la chambre voisine. Un instant de silence, puis un cri.)

ASTOLPHE, dans la chambre voisine.

Gabriel, tu es une femme ! Ô mon Dieu !

(On entend tomber le flambeau. La lumière disparaît. Gabriel rentre éperdu. Astolphe le suit dans les ténèbres et s’arrête au seuil de la porte.)

ASTOLPHE.

Ne crains rien, ne crains rien ! Maintenant je ne franchirai plus cette porte sans ta permission. (Tombant à genoux.) Ô mon Dieu, je vous remercie !