Page:Sand - Jean Ziska, 1867.djvu/283

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ANTONIO.

Un instant ! Je dois vous dire d’abord ce que je pense ; il est bon que vous ne vous y mépreniez pas. En mon âme et conscience, depuis le jour où pour la première fois je vous vis habillé en femme à un souper chez Ludovic, je n’ai pas cessé de croire que vous étiez une femme. Votre taille, votre figure, votre réserve, le son de votre voix, vos actions et vos démarches, l’amitié ombrageuse d’Astolphe, qui ressemble évidemment à l’amour et à la jalousie, tout m’a autorisé à penser que vous n’étiez pas déguisé chez Ludovic et que vous l’êtes maintenant…

GABRIEL.

Monsieur, abrégeons ; vous êtes fou. Vos commentaires absurdes m’importent peu, nous devons nous battre ; je vous attends.

ANTONIO.

Oh ! un peu de patience, s’il vous plaît. Quoiqu’il n’y ait guère de chances pour que je succombe, je puis périr dans ce combat ; je ne veux pas que vous emportiez de moi l’idée que j’ai voulu faire la cour à un garçon, ceci ne me va nullement. De mon côté, je désire, moi, ne pas conserver l’idée que je me bats avec une femme ; car cette idée me donnerait un trop grand désavantage. Pour remédier au premier cas, je vous dirai que j’ai appris dernièrement, par hasard, sur votre famille, des particularités qui expliqueraient fort bien une supposition de sexe pour conserver l’héritage du majorat.

GABRIEL.

C’est trop, monsieur ! Vous m’accusez de mensonge et de fraude. Vous insultez mes parents ! C’est à vous maintenant de me rendre raison. Défendez-vous.

ANTONIO.

Oui, si vous êtes un homme, je le veux ; car, dans ce cas, vous avez en tout temps trop mal reçu mes avances