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par sa merveilleuse dévotion, et qui, par son assiduité à prêcher, a souffert une grande persécution, et cela à cause de la vérité évangélique. » Celui-là détestait les moines, et leur reprochait « d’avoir abandonné l’unique sauveur Jésus-Christ pour des François et des Dominique. » On ne voit point que l’enthousiasme joannite des ordres mendiants ait établi un lien sympathique entre eux et les Bohémiens. Soit que ceux de ces moines qui habitaient le pays ne partageassent pas cet enthousiasme à l’époque où il éclata en Italie et en France, soit que la haine des couvents l’emportât sur toute similitude de doctrine chez les Bohémiens, il est certain que cette doctrine changeant de nom et de prédicateurs, leur arriva un peu tard et leur servit d’arme contre tous les ordres religieux.

Ces docteurs bohémiens avaient tenté surtout de rétablir les coutumes de l’Église grecque, auxquelles la Bohême, convertie primitivement au christianisme par des missionnaires orientaux, avait toujours été singulièrement attachée. La communion sous les deux espèces et l’office divin récité dans la langue du pays, étaient surtout les cérémonies qui lui paraissaient constituer sa nationalité, représenter ses franchises, et préserver dans l’esprit du peuple l’égalité des fidèles devant Dieu et devant les hommes de la tyrannie orgueilleuse du clergé. Nous reviendrons sur cet article, qui est le motif de la guerre hussitique et le symbole de l’idée révolutionnaire de la Bohême à cette époque, ainsi que l’enveloppe extérieure de l’œuvre du Taborisme.

La noblesse tenait tout autant que le peuple (du moins la majorité de la pure noblesse bohème) à ces antiques coutumes. Grégoire VII les avait anéanties. Mais l’autorité de cet homme énergique n’avait pu décréter l’orthodoxie d’une nation qui n’avait jamais été ni bien grecque, ni bien latine, qui portait l’amour de son indépendance principa-