Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/145

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pour la dernière fois. Coupé en deux par la bise, je sentais mes larmes geler dans mes yeux et ma pensée se glacer dans mon cerveau.

Enfin je reconnus que cette passion devenait une monomanie, et que je n’avais pas en moi les forces suffisantes pour m’y soustraire. Ma conscience me disait pourtant que j’avais fait mon possible, et ma mère, qui le voyait bien, me rendait justice. Nous nous trompions, elle et moi, en ce que nous ignorions le remède. Il eût fallu travailler, et je travaillais assez assidûment ; mais mon éducation première ne m’avait pas appris à travailler avec fruit, et ma mère ne savait pas plus que moi quelle intime relation existe entre la lumière qui se fait dans l’esprit et le rassérénement qui peut s’opérer dans le cœur. Mes études me semblaient arides : je les poursuivais comme une tâche volontaire, comme un certain nombre d’heures arrachées de vive force, chaque jour, à l’obsession de mon chagrin ; mais je ne les aimais pas, ces études sans lien et sans but. Elles me donnaient les accablements de la fatigue sans me verser les douceurs du repos.

Et pourtant j’avais entendu Love vanter les bienfaits du travail et dire devant moi, en parlant de son père, que toutes les peines de l’âme cédaient devant une conquête de la science. Je lui en voulais d’être si croyante à cette sorte de religion où on l’avait élevée. J’enviais