Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/131

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succomber !… Vous parlez de votre mère, et cela m’a rappelé la mienne. Savez-vous que c’est elle que j’aime encore et que je ménage dans son fils ? Si vous saviez comme il lui ressemble, et comme elle l’aimait ! Elle l’aimait plus que moi. Je voyais bien sa préférence, et, loin d’en être jalouse, je donnais tous mes instants et toute ma vie à ce cher enfant. Que voulez-vous ! c’est une habitude prise dès un âge que je ne saurais vous dire, car je ne me rappelle pas le moment où j’ai commencé à m’oublier pour Hope. J’ai été bercée avec ces mots : « Il est né après toi, c’est pour que tu le serves. Tu sais marcher et parler, c’est pour que tu le devines et que tu le portes. » Et, quand ma mère s’est sentie mourir, elle m’a parlé, à moi enfant de dix ans, comme si j’eusse été une mère de famille. Elle m’a dit :

» — Tu vois que ton père aime la science, c’est beau et respectable. Vénère la science par amour pour lui, et apprends tout ce qu’il voudra que tu saches, quand même cela ne devrait jamais servir qu’à lui être agréable. Tu es forte et tu as de la mémoire. Hope est encore mieux doué que toi ; mais il est délicat et pas assez gai pour son âge. Prends garde que ton père n’oublie cela, et qu’il ne se fie trop à des facultés précoces. Sois toujours là, et fais en sorte que mon fils travaille assez pour contenter le cœur de son père et développer ses propres aptitudes, mais pas assez pour que sa