Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/140

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Vous allez me dire pour la vingtième fois que vous attendez l’avenir, et que vous ne voulez pas perdre la dernière lueur d’espérance. Eh bien, comme cette lueur d’espérance, au lieu de vous soutenir, vous paralyse, il faut que vous sachiez la vérité, et je prends sur moi de vous la dire. Tout est fini entre miss Butler et vous. Votre mère lui a écrit pour l’engager à se prononcer et à ne pas vous laisser dans une expectative funeste à votre santé, à votre caractère, à votre dignité. C’est M. Butler qui a répondu, et j’ai là sa lettre.

J’étais si malheureux, que je reçus ce dernier coup sans paraître le sentir. Je pris la réponse de M. Butler et j’essayai de la lire ; mais elle était en caractères tellement hiéroglyphiques que je ne saisissais que des commencements de phrase ou des mots sans suite. Je n’ai jamais souffert comme je souffris en essayant de déchiffrer cette écriture impossible. J’étais comme dans un de ces rêves où l’on voit trouble au physique et au moral, où l’on se sent étouffé et emprisonné par un nuage qui vous suit et vous presse, en quelque endroit que l’on se mette pour s’en délivrer. Ma sentence était sous mes yeux, mais c’était comme un mystère impénétrable dont je ne pouvais saisir ni les causes ni les motifs. Je rendis la lettre à M. Louandre en lui disant :