Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/219

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questions sur les habitudes de la prairie, les mœurs des chalets, et même elle me demanda si j’avais été gardeur de troupeaux dans mon enfance. Je n’hésitai pas à répondre oui, et, comme je pouvais parler ex professo de ces choses qui diffèrent pourtant de celles de ma localité, mais que j’avais eu le loisir d’étudier là en d’autres temps, mes réponses parurent naturelles. Ma voix ne disait plus rien au cœur de Love. Elle causa avec moi comme avec un étranger, avec un paysan quelconque. En ce moment, le soleil frappait très-fort sur elle, et je voyais la sueur perler sur son front ; j’ouvris un grand parapluie dont j’étais muni, et je le tins sur sa tête. Elle ne prenait jamais aucune de ces précautions pour elle-même ; mais elle pensa que je voulais gagner ma journée en conscience, et elle me laissa faire. Je lui demandai si elle avait soif, et, sans trop attendre la réponse, je courus traire une chèvre dans ma tasse de cuir. Elle prit en souriant ce que je lui offrais, et, après avoir bu, elle m’envoya auprès de son père et de son frère pour leur proposer de goûter cet excellent lait. Me trouvait-elle importun, comme le sont certains guides trop attentionnés ? Dans tous les cas, elle ne parut pas vouloir me le faire sentir, car, lorsque je revins auprès d’elle, Love me parla encore pour me demander si j’avais femme et enfants. Je lui répondis à tout hasard que j’avais une belle