Page:Sand - Jean de la Roche (Calmann-Levy SD).djvu/81

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enfant, c’est parce qu’il est plus jeune que moi, car je vous assure qu’il a autant de raison et de bon sens qu’un homme fait. Il ne me chagrine que par un côté de son humeur : c’est qu’il aime trop le travail et que, si on le laissait faire, il se tuerait. Aussi, je le fais jouer et courir tant que je peux, et je dois dire que, quand il y est, il en prend autant qu’un autre, mais il faut que je pense toujours à cela et que je ne m’endorme pas là-dessus, car les médecins disent que, s’il était abandonné à lui-même, il n’en aurait pas pour longtemps.

— Et si vous le perdiez,… vous seriez inconsolable ?

— Je ne sais pas bien ce que veut dire ce mot-là : inconsolable ; j’ai perdu ma mère, et j’ai pourtant pris le dessus… Mais, au fait, votre mot est juste ; je vis, je m’occupe, et je suis gaie comme tout le monde ; pourtant, quand je pense à elle,… non, je ne suis pas consolée pour cela, et vous avez raison : ce serait la même chose, si je perdais mon frère.

Et elle essuya du revers de la main deux grosses larmes qui roulèrent sur ses joues sans qu’elle songeât ni à les cacher ni à les montrer.

— Mais, comme votre père et votre frère vous restent, vous avez du courage ?

— Et du bonheur, c’est vrai. Si je perdais mon cher