Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/39

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trumens de musique et des vases remplis de fleurs.

» Le pays était sans beautés apparentes : je l’avais aimé d’abord pour sa tristesse uniforme, pour le silence de ses vastes plaines. J’avais espéré m’y détacher entièrement de toute sensation vive, de toute admiration exaltée. Avide de repos, je croyais pouvoir sans fatigue et sans danger promener mes regards sur ces horizons aplanis, sur ces océans de bruyères dont un rare accident, un chêne raccorni, un marécage bleuâtre, un éboulement de sables incolores, venaient à peine interrompre l’indigente immensité.

» J’avais espéré aussi que dans cet isolement absolu, dans ces mœurs farouches et pauvres que je me créais, dans cet éloignement de tous les bruits de la civilisation, je trouverais l’oubli du passé, l’insouciance de l’avenir. Il me restait peu de force pour regretter, moins encore pour désirer. Je voulais me considérer comme morte et m’ensevelir dans