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Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 1.djvu/337

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si mal placée dans la vie, qu’elle se laissa tomber sur l’herbe, et s’abandonna à ces pleurs puérils qui sont l’affreuse expression d’un abandon complet de la force et de l’orgueil humain. Lélia était plus forte en apparence qu’aucune créature de son sexe. Jamais, depuis qu’elle était Lélia, personne n’avait surpris les secrets de son ame sur son impassible visage ; jamais on n’avait vu couler une larme de souffrance ou d’attendrissement sur sa joue sans couleur et sans pli.

Elle avait horreur de la pitié d’autrui, et, dans ses plus grandes détresses, elle conservait l’instinct de s’y dérober. Elle cacha donc sa tête dans son manteau de velours ; et loin du monde, loin de la lumière, blottie dans les hautes herbes d’un coin abandonné du jardin, elle répandit sa souffrance en larmes vaines et lâches. Il y avait quelque chose d’effrayant dans la douleur de cette femme si belle et si parée, gisante là, roulée sur elle-même, languissante et terrible dans sa dou-