Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 1.djvu/35

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désormais rendre compte à Dieu ! Insoucieuse et distraite, tu as saisi le bout de ma chaîne, et à chaque instant tu l’oublies, tu la laisses tomber !

Il faut qu’à chaque instant, effrayé de me voir seul et abandonné, je t’appelle et te force à descendre de ces régions inconnues où tu t’élances sans moi. Cruelle Lélia ! que vous êtes heureuse d’avoir ainsi l’ame libre et de pouvoir rêver seule, aimer seule, vivre seule ! Moi je ne le peux plus, je vous aime. Je n’aime que vous. Tous ces gracieux types de la beauté, tous ces anges vêtus en femmes qui passaient dans mes rêves, me jetant des baisers et des fleurs, ils sont partis. Ils ne viennent plus ni dans la veille ni dans le sommeil. C’est vous désormais, toujours vous, que je vois pâle, et calme, et triste, et silencieuse, à mes côtés ou dans mon ciel.

Je suis bien misérable ! ma situation n’est pas ordinaire ; il ne s’agit pas seulement pour moi de savoir si je suis digne d’être aimé de