Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/14

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— Et vous avez raison, cruelle, dit Lélia avec amertume. Ne sais-je pas tout cela ? Eh bien ! c’est mon travers, c’est mon mal, c’est ma fatalité que vous signalez, et vous me raillez quand je viens me plaindre à vous. Je m’humilie et m’afflige d’être un type si trivial et si commun de la souffrance de toute une génération maladive et faible, et vous me répondez par le mépris. Est-ce ainsi que vous me consolez ?

— Pardonne, meschina ! dit l’insouciante Pulchérie en souriant, et continue.

Lélia reprit :

« Si Dieu m’a créée dans un jour de colère ou d’apathie, dans un sentiment d’indifférence ou de haine pour les œuvres de ses mains, c’est ce que je ne sais point. Il est des instans où je me hais assez pour m’imaginer être la plus savante et la plus affreuse combinaison d’une volonté infernale. Il en est d’autres où je me méprise au point de me regarder comme une production inerte engen-