Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/217

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— Ta voix s’affaiblit, Sténio, cria Marino du bout de la table. Tu sembles chercher tes vers et les tirer avec effort du fond de ton cerveau. Je me souviens du temps où tu improvisais douze strophes sans nous faire languir. Mais tu baisses, Sténio. Ta maîtresse et ta muse sont également lasses de toi.

Sténio ne lui répondit que par un regard de mépris : puis, frappant sur la table, il reprit d’une voix plus assurée :


Qu’on m’apporte un flacon, que ma coupe remplie
Déborde, et que ma lèvre, en plongeant dans la lie
            De ce flot radieux,
S’altère, se dessèche et redemande encore
Une chaleur nouvelle à ce vin qui dévore,
            Et qui m’égale aux Dieux !

Sur mes yeux éblouis qu’un voile épais descende,
Que ce flambeau confus pâlisse ! et que j’entende,
            Au milieu de la nuit,
Le choc retentissant de vos coupes heurtées,
Comme sur l’Océan les vagues agitées
            Par le vent qui s’enfuit !