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Page:Sand - Lélia, édition Dupuy-Tenré, 1833, tome 2.djvu/95

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siasme aussi s’est refroidi, et c’est après de longs jours d’assoupissement et de dégoût que je retrouve parfois de courtes heures de jeunesse et d’activité. L’ennui désole ma vie, Pulchérie, l’ennui me tue. Tout s’épuise pour moi, tout s’en va. J’ai vu à peu près la vie dans toutes ses phases, la société sous toutes ses faces, la nature dans toutes ses splendeurs. Que verrai-je maintenant ? Quand j’ai réussi à combler l’abîme d’une journée, je me demande avec effroi avec quoi je comblerai celui du lendemain. Il me semble parfois qu’il existe encore des êtres dignes d’estime et des choses capables d’intéresser. Mais, avant de les avoir examinés, j’y renonce par découragement et par fatigue. Je sens qu’il ne me reste pas assez de sensibilité pour apprécier les hommes, pas assez d’intelligence pour comprendre les choses. Je me replie sur moi-même avec un calme et sombre désespoir, et nul ne sait ce que je souffre. Les brutes dont la société se com-