Page:Sand - L Homme de neige vol 1.djvu/198

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s’il eût eu toutes ses aises. Enfin, sa toilette du matin étant terminée de manière à lui permettre de n’avoir plus qu’un habit à passer en cas de besoin, il remonta sa montre, regarda le ciel, où ne se montrait pas encore la moindre lueur du matin, endossa sa robe de chambre, et, ouvrant ses deux portes, il se mit en devoir d’aller tout préparer dans son salon (la chambre de l’ourse) pour travailler chaudement et tranquillement jusqu’à l’heure du déjeuner.

Mais, comme il approchait du poêle en rabattant de la main devant lui la clarté vacillante de sa bougie, il tressaillit à la vue d’une figure humaine couchée en travers entre le poêle et lui, le corps enfoncé dans le grand fauteuil, la tête renversée en arrière sur le dossier à oreillettes, et les jambes plongées, au niveau du corps dans la grande bouche de chaleur qui s’ouvrait immédiatement au-dessus du foyer du poêle éteint, mais encore chaud.

— Hé ! un beau dormeur ! une figure superbe ! se dit l’avocat, arrêté à contempler le paisible et profond sommeil de Cristiano ; quelque fils de famille qui, comme moi, sera venu chercher un refuge au vieux château contre le bruit et encombrement du château neuf. Allons, je croyais, j’espérais au moins être seul dans ce lieu maudit ; mais il n’y a pas moyen, et je dois me résigner à avoir un compagnon.