— Ni moi non plus, à coup sûr. Et cependant… Tenez Christian, il y a, indépendamment de la superstition, quelque chose d’inexplicable dans les effets que la nature du Nord produit sur les imaginations vives. Cela est dans l’air, dans les sons singulièrement répercutés sur les glaces, dans les brumes pleines de formes mystérieuses, dans les mirages merveilleux de nos lacs, le hagring, phénomène inouï dont vous avez certainement entendu parler, et que vous pourrez voir sur celui-ci d’un moment à l’autre ; cela est peut-être aussi dans les désordres physiques causés à la circulation du sang par le passage continuel de l’atmosphère glacée à celle de nos appartements, qui est trop chargée de calorique, et réciproquement par le passage subit et inévitable du chaud au froid. Enfin, que vous dirai-je ? les gens les plus raisonnables, les mieux portants, les moins crédules, ceux mêmes qui avaient passé la plus longue moitié de leur vie à l’abri de ces illusions, en sont tout à coup saisis, et, moi qui vous parle…
— Achevez, monsieur Goefle… à moins pourtant que ce récit ne vous soit trop pénible, car vous voilà pâle comme votre serviette.
— Et je me sens mal à l’aise pour tout de bon. Cela m’est arrivé deux ou trois fois aujourd’hui. Pauvre machine que l’homme ! tout ce qui dépasse