on n’a pas l’habitude… Voyons donc un peu. Je suppose que je plaide… Que plaiderais-je bien ?
— Plaidez pour un baron accusé d’avoir fait assassiner son frère !
— Pour ? J’aimerais mieux plaider contre.
— Si vous plaidez contre, vous serez pathétique ; si vous plaidez pour, vous pourrez être comique.
— Soit, dit M. Goefle en allongeant le bras qui tenait la figurine et en gesticulant. Je plaide, écoutez. « Que pouvez-vous alléguer contre mon client, ô vous qui lui reprochez une action aussi simple, aussi naturelle que celle d’avoir supprimé un membre gênant de sa famille ? Depuis quand un homme qui aime l’argent et la dépense est-il astreint à respecter cette vulgaire considération que vous appelez le droit de vivre ? Le droit de vivre ! mais nous le réclamons pour nous-mêmes, et qui dit le droit de vivre, dit le droit de vivre à sa guise. Or, donc, si nous ne pouvons vivre sans une fortune considérable et sans les privilèges de la grandeur, si, faute de luxe, de châteaux, de crédit et de pouvoir, nous sommes condamnés à périr de honte et de dépit, à crever d’ennui, comme on dit en langue vulgaire, nous avons, nous revendiquons, nous prenons le droit de nous débarrasser de tout ce qui fait obstacle à l’épanouissement, à l’extension, au rayonnement de notre vie