Page:Sand - L Homme de neige vol 2.djvu/213

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ron sembla s’amuser beaucoup. Don Sanche ne paraissait pas. La langue ne tourna plus à M. Goefle, et sa voix fut si bien déguisée, que personne ne se douta de sa présence. Dans l’entr’acte, il but plusieurs verres de porto pour soutenir son entrain, et il était un peu gris au troisième et dernier acte, qui eut encore plus de succès que les précédents.

Parallèlement à l’action burlesque où Stentarello divertissait le public, Christian avait fait marcher une action sentimentale avec d’autres personnages. Dans ce dernier acte, Alonzo, l’enfant du lac, découvrait que Rosita, la fille des braves gens qui l’avaient élevé et adopté, n’était pas sa sœur, et lui exprimait son amour. Cette situation, bien connue au théâtre, a toujours été délicate. On n’aime pas à voir le frère passer brusquement de l’amitié sainte à une passion qui, en dépit du changement de situation, prend un air d’inceste improvisé. Les personnages de la jeune fille et d’Alonzo étaient les seuls que Christian n’eût pas chargés. Il avait fait de ce dernier un bon jeune homme vivant et pensant comme lui-même. Ce caractère entreprenant et généreux fut sympathique aux auditeurs, et les femmes, oubliant qu’elles avaient une marionnette devant les yeux, furent charmées de cette voix douce qui leur parlait d’amour avec une suavité chaste et un accent de franchise bien diffé-