bien dressé à suivre tous mes pas, qu’il n’était jamais un embarras pour moi, lorsque je rencontrai en un site agreste et désert un mendiant barbu dans lequel je crus reconnaître Guido Massarelli. Partagé entre le dégoût et la pitié, j’hésitais à lui parler, quand il me reconnut et vint à moi d’un air si humble et si abattu, que la compassion l’emporta. J’étais heureux dans ce moment-là et en train d’être bon. Assis sur une souche au milieu d’un abattis de grands arbres, je prenais mon repas avec appétit, tandis que mon âne paissait à quelques pas de moi. Pour le reposer, je l’avais débarrassé de son chargement, et j’avais mis entre mes jambes le panier qui contenait mes provisions de la journée. C’était peu de chose, mais il y avait assez pour deux. Massarelli, pâle et faible, semblait mourir de faim.
» — Assieds-toi là, lui dis-je, et mange. Je suis bien certain que tu es dans cette misère par ta propre faute ; mais il ne sera pas dit que je ne te sauverai pas encore une fois.
» Il me raconta ses aventures vraies ou fausses, s’accusa en paroles d’une humilité plate, mais s’excusant toujours au fond en rejetant ses fautes sur l’ingratitude ou la dureté d’autrui. Je ne pus le plaindre que d’être ce qu’il était, et, après une demi-heure d’entretien, je lui donnai quelques ducats et me