Il faudrait consacrer une journée à chacune de ces demeures d’un style varié au dedans comme au dehors. Cette variété étonne, éblouit, amuse et fatigue. Il y a beaucoup de marbres, beaucoup de fresques, beaucoup de dorures, et tout cela a coûté beaucoup d’argent. C’est petit et mignon à l’extérieur. Au dedans, les salles sont vastes et l’on s’étonne qu’elles tiennent dans des palais qui semblent tenir eux-mêmes si peu de place. Plus loin, il y a de belles promenades bordées de vilaines petites maisons ; des églises riches et encombrées de choses précieuses et coûteuses ; et puis des sentiers à pic, bordés de hautes maisons très-laides, des passages noirs qui s’ouvrent tout à coup sur des verdures éblouissantes, puis le roc à pic devant et derrière soi ; puis la mer vue d’en haut et toujours belle ; des fortifications gigantesques, interminables ; des jardins sur les toits ; des villas jetées au hasard sur les collines environnantes, profusion de bâtisses criardes, qui, vues de loin, gâtent le cadre naturel de la ville ; enfin, c’est incohérent : ce n’est pas une cité, c’est un amas de nids que toutes sortes d’oiseaux sont venus construire là, chacun faisant à sa tête et s’emparant de la place et des matériaux qui lui plaisaient. Si on ne se disait pas que c’est l’Italie, on se persuaderait volontiers que ce n’est pas ce que l’on attendait ; mais il faut ne point penser à cela, et plutôt se livrer à cette influence de désordre et de caprice qui rend un peu fou à première vue.
Après avoir couru deux ou trois heures, tantôt choqué, tantôt ravi, je suis entré dans quelques palais. Ah ! mon ami, que j’ai vu de beaux Van Dyck et de beaux Véronèse ! Mais les étranges intérieurs que ceux de ces nobles Génois ! Quels drôles de petits détails attestent l’incurie ou l’absence du goût ! quelles croûtes de portraits modernes, quels mesquins petits meubles, quelles plaisantes acquisi-