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Page:Sand - La Daniella 2.djvu/286

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relève, je m’habille, je crois que Medora m’attend au jardin ou dans le casino de Baronius, où nous avions coutume de babiller souvent jusque minuit. Je retrouve la Vincenza dans l’escalier.

» — C’est chez mon mari qu’on vous attend, me dit-elle.

» Je soupire d’avance, et me voilà courant de plus belle. Arrivé à la ferme, je commence à me dire que Felipone veut, en effet, se débarrasser de moi. Mais le jockey de Medora vient à moi et me dit que sa maîtresse est dans la chambre basse, celle qui communique avec le souterrain. Je sentais de plus en plus le piége ; mais que faire ? Si Medora était là, en effet, pouvais-je reculer ? À peine entré dans cette maudite chambre, où je ne voyais pas la moindre lumière, je me sens pris dans une couverture qui m’enveloppe la tête, et j’ai beau crier et jurer, on m’importe dans le souterrain comme on ferait d’un petit enfant. Arrivé dans la fameuse cuisine, je suis lié et bâillonné par plusieurs personnages dont l’un m’est inconnu. Felipone était l’autre. Cette fois il y avait de la lumière.

» Je pensais qu’on allait m’égorger ; aussi, je me défendais en désespéré, et j’essayais de hurler comme un diable. Une demi-heure de résistance enragée ne m’a servi de rien, sinon, qu’à me laisser brisé et épuisé. Eh bien, pendant tout ce temps, Felipone était admirable de sang-froid, je devrais dire héroïque ; il me terrassait encore plus par là que par la force de ses muscles. Au milieu de mon exaspération, j’entendais les courtes phrases qu’il me jetait de temps en temps :

» — Signore, vous êtes imprudent de vous tant défendre… Vous me teniez sans pitié… J’ai juré de ne pas vous faire de mal… jugez si j’ai de la peine à tenir parole. Ne m’injuriez pas, ne me faites pas perdre patience. Il m’en faut beaucoup ! »

Et, de temps en temps, il s’adressait à son acolyte : « Tu vois, Orlando, si je le blesse et si je le serre trop fort. À