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Page:Sand - La Daniella 2.djvu/81

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un grand succès. On l’applaudit, mais on lui refusa l’échelle pour descendre.

J’avais quitté le salon, où le prince dormait au bruit des chants et de la danse, pour crayonner, selon son désir, un aperçu de la scène bizarre à laquelle les lourds piliers blafards et les sombres voûtes déjetées de l’édifice servaient de cadre. Je cherchais un endroit d’où je pusse voir les groupes principaux bien éclairés, les valets assis par terre autour d’un dîner copieux dont on ne devait pas conserver les restes, les maîtres groupés au fond, et Tartaglia enchâssé comme un saint dans sa niche. J’aurais voulu pouvoir arranger les chose de manière à compléter l’originalité presque énigmatique de cette composition, par la présence des chevaux au premier plan ; mais c’était impossible, ils étaient placés trop au-dessous du sol.

Comme je les regardais du haut de l’escalier, je vis qu’il y en avait maintenant une douzaine. Je fus frappé de la beauté de la tête et des jambes de l’un de ces animaux, et je descendis quelques marches pour l’examiner. Il me semblait l’avoir déjà vu ; mais la physionomie d’un cheval ne vous reste pas présente comme celle d’un homme, et, d’ailleurs, il avait le corps couvert d’un grand manteau. Je ne cherchai pas beaucoup à débrouiller ce souvenir. Je me mis à dessiner ce que mon œil pouvait embrasser dans la composition fortuite du tableau.

Pendant que j’étais ainsi occupé, deux femmes étaient arrivées : l’une était la fermière des Cyprès, l’épouse de Felipone, la Zerline du docteur, et, comme je le savais déjà par Daniella, l’ancienne amie, la Vincenza de Brumières ; une petite femme brune, pâle et dodue, assez jolie et très décidée.

L’autre était la dame voilée, tout en noir, la taille cachée sous un mantelet court, et relevant sur son bras une longue