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que beaucoup de philosophes et de savants croient vague et creuse parce qu’elle est mystérieuse et infinie.

Un jour, Stéphen, qui, malgré le conseil de Schwartz, ne voulait pas être compositeur de musique, reprit ses études générales et réserva ses jouissances musicales pour ses heures de loisir. Mais, le soir, il lui arriva un triomphe sur lequel il était loin de compter et qui fit entrer son âme dans une nouvelle phase d’ivresse et de joie. Il nous le racontera lui-même.




IX


ancien journal de stéphen.


15 mars 1833.

Elles ont parlé ce soir de partir ! Elles veulent retourner à Saule dans un mois. Et moi, que vais-je donc devenir ? Je le savais pourtant, qu’elles passeraient la belle saison là-bas ! et je l’avais oublié à force de ne pas vouloir que ce fût possible.

Non, elles ne partiront pas, ou je trouverai moyen de les suivre ; elle me l’a presque dit ; elle ne peut pas vouloir me tromper ; elle parlait, d’ailleurs, malgré elle… Ah ! c’est là ce qui me fait peur : si elle avait réfléchi, elle n’aurait pas dit cela. À quoi pensais-je quand j’ai mis une main distraite sur ce piano ? Je ne l’avais vu jamais ouvert. Je sais qu’Anicée chante un peu, mais avec tant de timidité ou de mystère, que ce bel ornement est là comme un meuble de parade. J’ai cru qu’on attendait quelque artiste, j’étais curieux d’enten-