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la ville noire.

propre ne le détournait de son but. Bref, entre ses mains l’usine présentait un petit revenu net et à peu près sûr. En espérant doubler le capital en peu d’années, Sept-Épées avait compté sur ces miracles que l’orgueil caresse, mais qui ne se réalisent presque jamais par des moyens scrupuleux et prudents.

En voyant le cours des choses humaines et supputant les chances commerciales partout où il passait, l’armurier, désormais plus rassis et plus expérimenté, arrivait à se convaincre qu’il n’avait pas fait un mauvais placement de ses économies, mais qu’il n’achèterait jamais une maison peinte et un parc fleuri dans la ville haute, déception qui n’était pas nouvelle pour lui et qui ne le préoccupait plus par elle-même, mais qui s’enchaînait au repentir et au regret de n’avoir pas épousé Tonine. Il pensait avec amertume au bonheur de Gaucher, qui, vivant pour les objets de son ardente affection, avait si facilement oublié les tentations de la vie aisée et indépendante. Cette austère félicité qui lui avait paru une geôle humiliante se montrait maintenant à Sept-Épées comme un mirage évanoui au sein