Page:Sand - La Ville noire.djvu/61

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
51
la ville noire.

chapper après qu’on l’a vingt fois rattrapée et domptée, c’est peut-être de quoi devenir fou et renier Dieu !

Mais comme tout est aliment pour la passion, au lieu de plaindre le pauvre industriel et de redouter son mauvais sort, Sept-Épées ne songea qu’à profiter de son désastre. — Je suis sûr, se dit-il, que cette bicoque ne se vendra pas plus de ce que représentent deux années de mon travail ; une autre année payerait l’équipage et les outils. Or j’ai quatre années d’économies, et dès demain je pourrais être maître si je voulais, maître en petit à coup sûr, au dernier échelon de la caste ; mais à vingt-quatre ans c’est rare, et c’est honorable. Il me faudrait bien peu de temps pour faire prospérer ce petit établissement ; je le revendrais alors le double, peut-être le triple de ce qu’il m’aurait coûté, ce qui me permettrait d’en acheter un plus considérable, et ainsi de degré en degré, en me rapprochant du centre de nos industries, c’est-à-dire en descendant le cours de la rivière, je remonterais celui de la fortune.

Cette métaphore charma les esprits de l’armurier.