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disposée, par tout ce qui avait précédé cette scène, à la trouver sérieuse, effrayante même. Elle s’aperçut qu’elle tremblait visiblement, et sans les cinq minutes d’un profond silence où se tint l’assemblée, elle n’eût pas eu la force de se remettre et de se préparer à répondre.

Enfin, le huitième juge se leva et fit signe aux deux introducteurs, qui se tenaient, l’épée à la main, à la droite et à la gauche de Consuelo, de l’amener jusqu’au pied du tribunal, où elle resta debout, dans une attitude de calme et de courage un peu affectés.

« Qui êtes-vous, et que demandez-vous ? » dit l’homme noir sans se lever.

Consuelo demeura quelques instants interdite, enfin elle prit courage et répondit :

« Je suis Consuelo, cantatrice de profession, dite la Zingarella et la Porporina.

— N’as-tu point d’autre nom ? » reprit l’interrogateur.

Consuelo hésita, puis elle dit :

« J’en pourrais revendiquer un autre ; mais je me suis engagée sur l’honneur à ne jamais le faire.

— Espères-tu donc cacher quelque chose à ce tribunal ? Te crois-tu devant des juges vulgaires, élus pour juger de vulgaires intérêts, au nom d’une loi grossière et aveugle ? Que viens-tu faire ici, si tu prétends nous abuser par de vaines défaites ? Nomme-toi, fais-toi connaître pour ce que tu es, ou retire-toi.

— Vous qui savez qui je suis, vous savez sans doute également que mon silence est un devoir, et vous m’encouragerez à y persister. »

Un des manteaux rouges se pencha, fit signe à un des manteaux noirs, et en un instant tous les manteaux noirs sortirent de la salle, à l’exception de l’examinateur, qui resta à sa place et reprit la parole en ces termes :

« Comtesse de Rudolstadt, maintenant que l’examen