Page:Sand - La dernière Aldini. Simon.djvu/119

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Checchina aimait beaucoup les comparaisons mythologiques depuis qu’elle épelait l’Aminta di Tassa et l’Adone del Guarini), j’ai bien compris qu’il y avait là une véritable histoire de roman, une grande dame craignant le monde ou une petite fille risquant son établissement futur avec quelque honnête bourgeois. Ce qu’il y a de certain, c’est que tu as fait une de ces conquêtes dont vous autres hommes êtes si fiers, parce qu’elles passent pour difficiles et demandent beaucoup de cachotteries. Tu vois que j’ai deviné ? (Je répondis par un sourire.) Je ne t’en demande pas davantage, reprit-elle ; je sais que tu ne dois trahir ni le nom, ni la demeure, ni la condition de la personne ; d’ailleurs, cela ne m’intéresse pas. Mais je puis te demander si tu es enchanté ou désespéré, et tu dois me dire si je puis te servir à quelque chose.

— Si j’ai besoin de toi, je te le dirai, répondis-je ; et, quant à te faire savoir si je suis enchanté ou désespéré, je puis t’assurer que je ne suis encore ni l’un ni l’autre.

— Eh bien ! eh bien ! prends garde à l’un comme à l’autre ; car, dans les deux cas, il n’y aurait pas lieu à de si grandes émotions.

— Et qu’en sais-tu ?

— Mon cher Lélio, reprit-elle d’un ton sentencieux, supposons que tu sois enchanté. Qu’est-ce qu’une femme facile de plus ou de moins dans la vie d’un homme de théâtre : le théâtre, où les femmes sont si belles, si étincelantes d’esprit ? Vas-tu donc t’enivrer d’une bonne fortune du grand monde ? Vanité ! vanité ! Les femmes du monde sont aussi inférieures à nous sous tous les rapports que la vanité est inférieure à la gloire.

— Voilà qui est modeste, je t’en félicite, répondis-je ; mais ne pourrait-on pas retourner l’aphorisme, et dire