Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/284

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Pour monter dans l’infini, il ne faut qu’un élan au poëte. Ce qu’il y voit se confond souvent et se trouble ; mais par le vol, par l’aile, par l’ instrument, quel qu’il soit, littérature ou musique, sculpture ou peinture, l’action de s’élever, c’est l’art, et quiconque s’élève réellement fait tout ce que l’homme peut faire à lui seul.

Le savant monte autrement ; il se méfie de ses ailes, il gravit des échelons, il mesure, il suppute, il observe, il ne peut se passer du vaste attirail construit par le concours de ses devanciers. Il est le dépositaire sacré des notions positives, il ne lui est pas permis d’en ajouter une nouvelle à la masse sans l’avoir éprouvée de toute sa force. Et sa force le trompe souvent ! Et lui aussi, arrivé à une certaine région, il voit trouble ! N’importe, il s’élève quand même, et par lui la connaissance humaine s’enrichit sans cesse. Tout n’est pas erreur, même dans la moins parfaite vision du savant sincère, et chacun dans cette voie fait tout ce que l’homme peut faire avec l’aide des autres.