Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/309

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long détour pour l’aller chercher. D’ailleurs, c’est un bateau neuf ; ce n’est plus ce vieux bac si moussu et si vaseux que les boutons d’or y fleurissaient en paix, et s’en allaient, voyageant avec ce terrain de leur choix, d’une rive à l’autre. Notre ami est mort de vieillesse, ses flancs se sont ouverts, il s’en est allé avec sa végétation reposer à jamais au fond de la rivière. Honnête bateau, qui n’a pas voulu attendre que nous fussions sur ses planches, pour donner sa démission ! Je le regrette ; me voilà comme le père Pâques, qui attend que sa maison l’ensevelisse.

Et me voilà comme lui rentré seul sous mon toit de tuiles moussues. J’écoute le silence. J’adore aussi le bruit, mais le bruit formidable, la chute d’une cataracte, le passage d’une armée, le canon. J’ai souvent rêvé d’un orchestre de cent mille instruments, d’un chœur de cent mille voix sur le faîte d’une montagne. Paris ne m’a jamais semblé bruyant, c’est son défaut. Quant au silence, s’il manque d’ampleur et de durée, il n’est que triste et sournois. Il est recommandable à Nohant ; mais