Page:Sand - Laura - Voyages et impressions.djvu/351

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» Ai-je besoin que Lothario me démontre qu’un ruisseau n’est pas un être, et que cette expression de corps appliquée par la science nouvelle à de pures entités chimiques est une simple formule de convention, sans prétention d’aucune valeur en philosophie ? Non certes, pas plus que le métal qui résonne, pas plus que la foudre qui éclate, pas plus que la pierre qui siffle lancée par la fronde, pas plus que la brise qui rit et pas plus que la bise qui pleure, ce ruisseau n’a conscience du chant qu’il module sous sa roche et des paroles précipitées qu’il chuchote en sautillant sur ses cailloux. Ce qu’il dit et ce qu’il chante, il ne le sait pas, il ne le saura jamais.

» Mais, s’il n’est pas un être organisé, n’est-il pas un organe de 1& création ? n’appartient-il pas à ce grand être qu’on appelle la terre ? n’est-il pas une des innombrables petites veines qui se rattachent à son vaste système artériel ? Qui osera dire que notre planète, source de toute vie à sa surface, soit une matière inerte, un monde mort où la pourriture seule engendre les êtres vivants qui le