Page:Sand - Le Beau Laurence.djvu/300

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mais ma main n’est pas si laide que ma figure, voulez-vous y mettre votre petite main ?

» Je fus attendrie, sa main était très-belle. J’oubliai sa figure, je lui jetai les bras au cou et l’embrassai sur les deux joues. Il sentait bon, il a toujours eu un grand soin de sa personne. Sa figure était douce et unie. Depuis ce moment-là, je ne l’ai jamais vu laid.

» Quand il fut parti, on parla beaucoup de lui chez nous. Mon père, qui était un homme de mérite, très-lettré, faisait le plus grand cas de l’intelligence et des sentiments de Bellamare. Il le traitait en homme sérieux et le considérait comme un véritable artiste. Bellamare avait beaucoup de succès dans notre province, où il donnait alors des représentations. Mes parents y assistaient souvent. J’obtins un jour de les y suivre. Il jouait Figaro. Il était bien costumé, bien grimé, plein de vivacité, d’élégance et de grâce ; il me parut charmant. Ses défauts mêmes, son mauvais organe, me plurent. Il m’était impossible de séparer ses désavantages physiques de ses qualités. On l’applaudit passionnément. Je fus exaltée par son succès, on me permit de lui jeter un bouquet dont la bandelette portait