Page:Sand - Le Dernier Amour, 1882.djvu/293

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faiblesse. Elle railla mon optimisme. Je la laissai dire sans répliquer, elle se tut, elle n’osa plus y revenir.

Vanina demanda bientôt à me voir, elle était pressée de partir. Irritée contre Félicie, elle ne s’expliquait pas ; mais, sans l’interroger, je vis bien que tout était à jamais rompu entre elles. Vanina savait maintenant que cette fortune annoncée par moi à son mari n’était autre chose qu’un don imposé par moi à Félicie, don considérable eu égard à sa petite fortune territoriale. Vanina souffrait de voir Tonino accepter ce bienfait, que sans doute Félicie lui avait reproché en le lui révélant. Elle voulait partir avec ses deux enfants et une servante, rejoindre Tonino avant qu’il se fût établi, l’empêcher de profiter de ma générosité, le forcer à être pauvre au besoin, à travailler avec courage sans rien devoir à personne.

— Il y a bien assez ici, disait-elle, pour nous acquitter envers votre femme : qu’elle reprenne tout ce qu’elle nous a donné. Moi, je ne veux plus rien lui devoir. Je suis forte et je suis fière. Je ne crains pas ma peine et je ne suis pas inquiète de mon mari. Il a trop d’esprit pour ne pas faire fortune sans le secours des autres.

Je cherchai à lui faire entendre qu’elle n’avait pas le droit de refuser ce que, de bonne grâce ou non, ma femme donnait à son mari, et par conséquent à ses enfants. D’ailleurs, avant de faire un éclat que Tonino pouvait blâmer et rendre inutile, il fallait le consulter. Elle me promit de prendre patience jus-