Page:Sand - Le Diable aux champs.djvu/144

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JENNY. — À la maison blanche. — Je sais qu’elle y est maintenant avec les artistes, et je crains que déjà…

FLORENCE. — Les artistes sont d’honnêtes jeunes gens. Si le mal est fait, il n’ira pas plus loin, quant à eux.

JENNY. — Allez donc !

(Florence entre dans le pavillon où il demeure, dans le parc.)

GÉRARD, approche, agité. — Ah ! mademoiselle Jenny, je vous cherche. Je n’ai pas osé me présenter devant madame la comtesse avant de vous avoir vue. Vous connaissez cette folle de Myrto, à ce qu’il paraît ? Je la croyais partie pour Paris, et ce matin je lui ai renvoyé sa voiture à Sainte-Aigue, où elle m’avait dit qu’elle passerait la nuit. Eh bien elle s’est fait conduire ici par cet imbécile d’Antoine. Il s’est enivré sans doute, car je ne l’ai pas revu depuis hier, et la première personne que j’aperçois dans le village, c’est Myrto !

JENNY. — Ah ! mon Dieu ! elle vous a parlé.

GÉRARD. — Non. Je n’ai pas voulu qu’il pût être rapporté à madame la comtesse de Noirac que j’avais échangé un seul mot avec elle. Mais est-ce qu’elle est venue jusqu’ici ? Est-ce qu’elle aurait osé ?…

JENNY. — Je ne sais pas, monsieur ; je ne peux rien vous dire ; mais j’ai un conseil à vous donner, si véritablement vous aimez madame.

GÉRARD. — Si je l’aime ! en doute-t-elle ?

JENNY. — Oui.

GÉRARD. — Elle sait donc que Myrto est venue chez moi ? Vous le lui avez dit, Jenny, vous qui saviez bien…

JENNY. — Attendez, monsieur Gérard ; voilà Florence, à qui je veux parler. Ne bougez pas d’ici. (Allant à Florence, qui sort du pavillon.) Vous partez ? Ah ! mon Dieu, que vous êtes bien mis !… Vous m’intimidez comme cela ! Je vous aimais mieux en jardinier.

FLORENCE. — Et moi aussi ; mais en jardinier je n’aurais pas été aussi bien accueilli que je veux l’être…

JENNY. — Ah ! monsieur Florence, vous voulez donc plaire à cette… à cette pauvre Céline ?