Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/177

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et se demanda de prime abord si tout cela n’était pas affecté ; mais elle en prit vite son parti avec bienveillance et partagea l’erreur de tout le monde. Madame d’Arglade fut charmante pour elle, d’autant plus qu’elle avait, déjà questionné la marquise sur son compte, et qu’elle la savait bien ancrée dans les bonnes grâces de la vieille dame. Madame de Villemer la déclarait parfaite de tous points, vive et sage, franche et douce, d’une intelligence hors ligne et du plus noble caractère. Elle avait chaudement remercié madame d’Arglade de lui avoir procuré cette perle d’Orient, et madame d’Arglade s’était dit : « À la bonne heure ! je vois que Caroline pourra m’être utile ; elle l’est déjà. On fait donc bien de ne dédaigner et de ne négliger personne. » Et elle l’accablait de caresses et de flatteries qui semblaient aussi ingénues que des effusions de pensionnaire.

Au moment de se rendre chez son frère, le duc, qui était résolu à provoquer un raccommodement, marcha pendant cinq minutes dans le préau. Il lui revenait des bouffées de colère, et il craignait de n’être pas maître de lui, si le marquis renouvelait la semonce. Enfin il se décida, monta, traversa un long vestibule, entendant son sang battre si fort dans ses tempes, qu’il couvrait pour lui le bruit de ses pas.

Urbain était seul au fond de la bibliothèque, pièce longue et d’un style ogival, à voûtes élancées, qu’éclairait faiblement sa petite lampe. Il ne lisait pas ; mais, entendant venir le duc, il avait placé un livre