Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/186

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prairie enclavé dans les terres de Séval, et là il ferait en sorte que le médecin vît le malade, ne fut-ce que pour observer sa physionomie et son allure, sans donner d’avis officiel ; on verrait à soumettre cet avis à M. de Villemer, et peut-être consentirait-il à le suivre. Enfin le duc, qui ne savait pas veiller dans le calme et le silence de la nuit, avait besoin d’agir pour secouer son inquiétude. Il calcula qu’en une demi-heure il serait à Chambon, et qu’une heure lui suffirait ensuite pour réveiller le médecin, parler avec lui et revenir. Il pouvait, il devait être de retour avant que son frère, qu’il voyait calme et qui paraissait endormi, fût sorti de son premier sommeil.

Le duc le quitta sans bruit, gagna le dehors par le jardin, afin de n’être entendu de personne, et descendit d’un pas rapide vers le lit de la rivière jusqu’à une passerelle de moulin et à un sentier qui le conduisit à la ville en droite ligne. En prenant un cheval et en suivant la route, il eût fait du bruit et gagné fort peu de temps. Le marquis ne dormait pas si profondément qu’il ne l’eût entendu sortir de sa chambre ; mais, ignorant son projet et ne voulant pas l’empêcher d’aller se reposer, il avait feint de ne s’apercevoir de rien.

Il était alors un peu plus de minuit. Madame d’Arglade avait suivi Caroline dans sa chambre pour babiller encore, après avoir pris congé de la marquise.

— Eh bien ! chère belle, lui disait-elle, êtes-vous réellement aussi contente de cette maison que vous le