Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/268

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viendras pas ici avant l’heure du dîner. Il le faut, jure-le-moi !

Le marquis jura et tint parole ; mais la solitude, la nuit, la douleur de ne point voir Caroline et de la laisser entourée de regards et d’hommages étrangers ne firent qu’augmenter son impatience et aviver le feu de sa passion. D’ailleurs les précautions de sa mère, quoique sages en elles-mêmes, étaient puériles vis-à-vis d’un homme qui réfléchissait et voulait depuis si longtemps.

Caroline s’étonna de ne pas voir reparaître le marquis, et se retira une des premières, voulant se persuader qu’elle ne s’était pas trompée en supposant qu’il reprendrait vite possession de lui-même. On voit qu’elle était loin de pressentir la vérité.

Madame d’Arglade avait des espions dans ce bal, un entre autres qui se flattait de l’épouser, un secrétaire d’ambassade, qui, dès le lendemain matin, lui rapporta le grand succès de la demoiselle de compagnie. L’air enflammé du marquis n’avait point échappé à la pénétration de la malveillance, l’apprenti diplomate avait même flairé un entretien intéressant entre le marquis et sa mère au moment où ils étaient sortis ensemble.

Léonie parut écouter ce compte rendu avec indifférence ; mais elle se dit qu’il était temps d’agir, et à midi elle était chez la marquise au moment où Caroline s’y présentait.

— Un instant, chère amie, lui dit-elle, laissez-moi