Page:Sand - Le Marquis de Villemer.djvu/27

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beau, intelligent, destiné à devenir profondément sceptique, royalement prodigue et déplorablement libertin.

Remariée avec le marquis de Villemer, mère et veuve pour la seconde fois, la marquise avait trouvé dans Urbain, son second fils, un ami dévoué, généreux, aussi austère de mœurs que son frère était corrompu, et assez riche du fait de son père pour ne pas s’affliger trop de la ruine de sa mère, car à l’époque où nous abordons l’existence de ces trois personnages, la marquise n’avait presque plus rien, grâce au train que le jeune duc avait mené.

À cette époque, le jeune duc avait déjà trente-six ans passés, et le marquis en avait près de trente-trois. On voit que la duchesse d’Aléria n’avait pas perdu beaucoup de temps pour devenir marquise de Villemer. Personne ne l’en avait blâmée. Elle avait passionnément chéri son second époux. On dit même qu’elle l’avait aimé, en tout bien, tout honneur, avant d’être veuve du premier. C’était une nature généreuse et passablement exaltée que la marquise. Aussi la mort prématurée de ce second mari la rendit-elle presque folle pendant un ou deux ans. Elle ne voulut plus voir personne, et ses enfants même lui devinrent comme étrangers, ce que voyant, les deux familles de ses deux maris décédés songèrent à la faire interdire et à prendre soin de l’éducation de ses fils ; mais à cette idée la marquise rentra en elle-même. La nature fit un grand effort, l’âme se dégagea de son