n’être pas sincère avec toi, et je ne ferai d’ailleurs jamais le pédant de vertu, bien que tu m’aies un peu accusé de ce travers.
— C’est vrai, j’avais bien tort, je le vois ! Mais comment et pourquoi es-tu malheureux, mon pauvre frère ? Peux-tu me le dire ?
— Je ne peux pas te le dire, mais je veux te le confier. J’ai aimé !
— Toi ? tu as aimé une femme ? Quand cela donc ?
— Il y a déjà longtemps, et je l’ai aimée longtemps.
— Et tu ne l’aimes plus ?
— Elle n’est plus.
— C’était une femme mariée ?
— Précisément, et son mari vit encore. Tu permets que je ne la nomme pas.
— Ce serait tout à fait inutile ; mais… tu t’en consoleras, n’est-ce pas ?
— Je n’en sais absolument rien. Jusqu’à présent, je n’ai point réussi.
— Il n’y a pas longtemps qu’elle est morte ?
— Trois ans.
— Elle t’aimait donc beaucoup ?
— Non !
— Comment, non ?
— Elle m’aimait autant que peut aimer une femme qui ne doit ni ne veut rompre avec son mari.
— Bah ! ce n’est pas là une raison ! au contraire, les obstacles stimulent la passion.