M. Émile qui travaille comme un bon compagnon, et vous, gros et fort comme vous êtes, vous nous regardez suer en vous croisant les bras.
— Ma foi, tant pis pour vous, répondit Galuchet ; vous m’avez fait boire, je ne suis bon à rien.
— Oui, mais vous êtes lourd, et puisque vous ne travaillez pas, vous irez à terre. Au rivage, au rivage, mon petit Émile ! mettons à terre les paquets embarrassants ! »
Ils cinglèrent vers la rive ; mais Galuchet trouva le procédé offensant, et refusa d’aborder en jurant de la manière la plus cynique.
« Mille démons ! s’écria Jappeloup tout à fait en colère, tu m’as fait manquer une truite superbe, mais tu ne me feras pas échiner à ton service ! »
Et il le poussa hors de la barque ; mais, en faisant résistance, Galuchet glissa entre la barque et le rivage, et tomba dans l’eau jusqu’à la ceinture.
« Ma foi, c’est bien fait, dit Jappeloup : cela mettra de l’eau dans ton vin. »
Et il éloigna rapidement la barque, que Galuchet, transporté de fureur, essayait de faire chavirer.
« Ah ! le méchant garçon ! s’écriait le charpentier ; convenez que s’il y a de bonnes bêtes, il y en a aussi de bien mauvaises ! Laissez-le barboter, dit-il à ses compagnons, qui craignaient que le pauvre Galuchet, à cause de son état d’ivresse, ne vînt à se noyer, quoique l’endroit ne fût pas dangereux. S’il enfonce trop, je lui planterai mon crochet dans la ceinture et je le repêcherai comme un saumon. Mais bah ! si c’était quelque chose de bon, on pourrait s’inquiéter, au lieu que ce qui n’est bon à rien, les animaux morts et les bouteilles vides, surnage toujours. »