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LE PÉCHÉ


DE MONSIEUR ANTOINE




I

ÉGUZON.


Il est peu de gîtes aussi maussades en France que la ville d’Éguzon, située aux confins de la Marche et du Berry, dans la direction sud-ouest de cette dernière province. Quatre-vingts à cent maisons, d’apparence plus ou moins misérable (à l’exception de deux ou trois, dont nous ne nommerons point les opulents propriétaires, de peur d’attenter à leur modestie), composent les deux ou trois rues, et ceignent la place de cette bourgade fameuse à dix lieues à la ronde pour l’esprit procédurier de sa population et la difficulté de ses abords. Malgré ce dernier inconvénient qui va bientôt disparaître, grâce au tracé d’une nouvelle route, Éguzon voit souvent des voyageurs traverser hardiment les solitudes qui l’environnent, et risquer leurs carrioles sur son pavé terrible. L’unique auberge est située sur l’unique place, laquelle est d’autant plus vaste, qu’elle s’ouvre sur la campagne, comme si elle attendait les constructions nouvelles de futurs citadins, et cette auberge est parfois forcée, dans la belle saison, d’inviter les trop nombreux arrivants à s’installer