Page:Sand - Le Péché de Monsieur Antoine, Pauline, L’Orco, Calman-Lévy, 18xx, tome 2.djvu/90

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
87
DE M. ANTOINE.

ce n’est pourtant pas le vin qui nous a troublé la cervelle. Par où allons-nous sortir de là ?

— Je n’en sais rien ; il y a longtemps que nous marchons, et nous devrions être à Boisguilbault.

— Attendez ! attendez ! je me reconnais, dit le charpentier. Voilà derrière nous une petite clarté avec un gros arbre… attendons l’éclair… regardez bien… le voilà : oui, j’y suis. C’est la maison de la mère Marlot ! Diable, il y a des malades là-dedans, deux enfants qui ont la fièvre typhoïde, qu’on dit ! C’est égal, c’est une bonne femme, et d’ailleurs, sur toutes vos terres, vous êtes certain d’être bien reçu.

— Oui, cette femme est ma locataire, si je ne me trompe.

— Qui ne vous paie pas gros, ni souvent, que je crois ! Allons, donnez-moi la main.

— Je ne savais pas qu’elle eût des enfants malades, dit le marquis en entrant dans la cour de la chaumière.

— C’est tout simple ; vous ne sortez pas, et vous n’allez jamais si loin. Mais d’autres y ont pensé ; voyez ! voilà une carriole et un cheval de ma connaissance, ça peut nous servir.

— Quelle est donc cette dame, dit le marquis en regardant à travers la vitre de la chaumière.

— Vous ne la connaissez donc pas ? dit le charpentier tout ému.

— Je ne me rappelle pas de l’avoir jamais rencontrée, répondit M. de Boisguilbault en examinant l’intérieur avec plus d’attention. C’est sans doute une personne charitable, qui remplit auprès des malheureux les devoirs que je néglige.

— C’est la sœur du curé de Cuzion, reprit Jean Jappeloup, c’est une bonne âme, une jeune veuve très charitable, comme vous le dites. Attendez que je la prévienne