Page:Sand - Le compagnon du tour de France, tome 1.djvu/45

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statée, et démontrée dans des termes dont la technique vous effraie à tort ; car leur précision est plus facile à retenir que toutes les vagues définitions de l’usage vulgaire. Avec le secours du dessin, vous eussiez pu savoir à vingt ans ce que vous saviez peut-être à peine à quarante, et vous eussiez pu exercer votre grande intelligence sur de nouveaux sujets.

— Il y a du bon sens dans tout ce que tu dis là, répondit le père Huguenin ; mais si tu triomphes dans le défi que tu portes au fils de l’économe, crois-tu que son père ne nous en voudra pas mortellement, et ne confiera pas à quelque autre le travail qu’il nous a proposé ce matin ?

— Il n’aura garde de mécontenter ses maîtres. Rappelez-vous, mon père, que M. de Villepreux est un homme actif, vigilant, économe ; M. Lerebours sait bien qu’il faut que les choses soient bien faites et sans prodigalité ; c’est pourquoi il vous a choisi, quoiqu’il n’aime pas les anciens patriotes. Il vous conservera la pratique du château, n’en doutez pas, et d’autant plus que l’architecte lui dira que vous êtes plus capable que bien d’autres.

Dominé par la sagesse de son fils, le père Huguenin s’endormit tranquille, et, trois jours après, il fut mandé au château pour s’entendre avec l’architecte qui était venu en personne examiner les lieux et faire un devis des dépenses totales pour le compte du châtelain.

L’architecte était passablement enclin à donner gain de cause aux plus puissants, c’est-à-dire à M. Lerebours et à sa progéniture. Aussi, dès qu’il eut jeté les yeux sur les deux plans, il s’écria :

— Sans aucun doute le plan de monsieur votre fils est excellent, mon petit père Lerebours ; et le vôtre, mon pauvre ami Pierre, est boiteux de trois jambes. En parlant ainsi, il jetait dédaigneusement sur la table le plan